MATHEMATIQUES ET POLITIQUE / Message à Antoine Houlou-Garcia

Bonjour Antoine

Je suis désolé de n'avoir pu être à votre soutenance en janvier. J'espère que ça s'est bien passé. Continuez et ne lâchez pas. Sachez que dans la politeia d'Aristote il y a l'opposition entre politique et démocratique, il y a l'opposition entre gouvernement constitutionnel des individus notables (comme le souhaite Cicéron par sa Concordia Ordinum ou encore Lionel Jospin à la fin de son Malheur Napoléon (il invite à une République ou à un Parlement des notables)ou Monsieur Thiers pour s'assurer que ses usine lors de l'occupation prussienne ne tomberont pas aux mains des Allemands, pas fous les notables ! les importants disait Alain, les personnes notables des bourgs, alors que l'intelligence est de plus en plus contrainte au chômage, au chômage créateur dirait cet anarchiste chrétien d'Illich, je ne suis pas anarchiste mais tous les bords convergent dans le sinistrisme (concordance des gauches pour une Renaissance et une Révolution, les deux se produisant actuellement, car poser la démocratie mathématiquement comme vous le faites c'est être révolutionnaire comme les réformistes Clisthène et Solon dont vous parliez) et ce sont les chrétiens qui sont les plus écolos Grothendiexck le mystique avec sa théodicée finale reposant sur les ouverts mathématiques, Rabbhi, Latour (et sa caste écologique en 5e partie de son long entretien) ou Ellul ; vous retrouvez cela dans le livre le puritanisme "vert").

Peut-être que si vous saisissez cette différence, cet antagonisme mortel, cette stasis, ce diastème "politique" entre politie et démocratie. L'anglais policy est très proche du grec quand il entend les politiques publiques au nombre d'une dizaine (je m'amuse à la relever par ailleurs). La politique c'est l'usage de l'oligarchie, de la République non de la démocratie. Mais être en démocratie c'est exposer son orgueil aux Alcibiade de passage, aux fins opportunistes (refusés par Socrate).

Depuis le 4 janvier je me suis mis à Grothendieck, dont je perçois l'unité de l'oeuvre tant en mathématique qu'en philosophie par l'emploi de la même méthode de la marée montante de généralisation par équivalence et une importance très grande apportée à l'éducation comme sublimation de la pulsion d'inceste, il en parle dans la clé des songes, vous retrouvez cela chez bons nombre de philosophes dans les mémoires de Badiou, chez Schopenhauer dans sa lettre à son ami français, chez Nietzsche, chez Deleuze et encore quelques autres... Cela marche autrement chez les rationalistes comme Descartes et Kant puisqu'ils ont perdu leur mère et que l"effondrement du père ne peut fonctionner de la même manière ou avoir lieu. L'anthropologue métapsychologique Racamier nomme cela le climat inscestuel, c'est repris par Caillot, mais cela existe dans toute la théorie groupale de la troisième topique (les Kestemberg, Kaës, Ruffiot, dans le livre Sous le signe du clivage qui traite de la polytopie de l'inconscient qui dès lors ne peut fonctionner comme un langage mais comme des langues ancrées dans des aires, des territoires, des ères, des époques comme avec l'hellène que les latins trahissent en grec).

Vous œuvrez contre le climat incestuel, sachez-le !
 

Il y a plein d'avancées en France mais presque personne ne les voient soit qu'ils sont trop focalisés sur Onfray, Badiou ou Deleuze autant de divertisseurs dirait Clouscard, d'autorité horizontales, de personne pieds et poings liés à la politique républicaine, à la résistance impuissante où elle les a placés par le colonialisme très certainement. Sartre dans son premier tome de l'Idiot indique une voie fraîche quant à l'éducation et les synthèses (affective notamment), il semble rompre avec la subjectivité en ce qu'il rompt avec l'existentialisme et le marxisme - entendu par Michel Deguy comme la pensée de Marx tout en subjectivité et opposé au marxisme qui fonctionne comme un lit de Procuste).

Portez-vous en espérant que ce commentaire vous donne le sourire, celui actuellement sur ma face.