La Philosophie à Paris

EDITO / L’important, c'est la capacité d'agir du corps

26 Juillet 2007, 07:57am

Publié par Le Cazals

« L’important est d’être capable de quelque chose… » Nietzsche
 
Nous sommes passés d’une civilisation judéo-grecque et chrétienne où les valeurs étaient le Vrai, le Beau, le Bien et qui pour ses justes et ses prêtres prônait le désintérêt à une civilisation dont les valeurs sont l’important, l’attrait et l’énergie. Avec Schopenhauer ce qui s'appelait jusqu'alors l'essence ou la substance est devenu la force. Tout un changement s'est opéré dans la pensée. Mais cela existait déjà en germe chez Platon, quand il disait que nous nous rendons malheureux parce que nous ne savons ce qui a de l’importance ou encore quand il faisait dire à Socrate dans le Phèdre que tout grand bien ne nous tombe dessus que par un délire. Le délire et la capacité d’énergie, qui en découle, auraient-ils moins d’importance que les petits biens que nous gardons jalousement en notre possession ? Ainsi se retrouve poser l’éternel fracture entre la Vérité et ce qui a de l’importance. Toute époque qui aperçoit sur le versant en pleine lumière, les multiples voies qui lui sont offertes, toute époque à conjectures, est une époque d’Aurore, une époque capable d’indiquer ce qui pour elle à de l’importance. De là découle une civilisation capable de se libérer et d’augmenter sa capacité d’énergie. Sur l’autre versant, non celui en pleine lumière mais celui qui sent le déclin crépusculaire venir, simplement parce qu’elle n’est pas capable de digérer les grandeurs passées, se déploient ceux qui vont tirer le bilan des gloires passées parce qu’étant de la troisième génération, ils sentent ces grandeurs passées leur filer entre les mains et préfèrent les inscrire dans des textes, le IVème siècle de Platon et Aristote, vient après le VIème siècle d’Héraclite et le Vème siècle de Socrate, pour faire dans les grandes découpes . La philosophie, l’académique, la dogmatique, est née du jugement disait Deleuze, du bilan au fond d’un siècle de démocratie qui a vu naître tant les premiers philosophes « académiques » que les sophistes (ceux qui par la parole savaient tourner les procédures de contentieux en leur faveur, et il y avait beaucoup de contentieux entre amis dans l’Athènes de cette époqu
 
Dans le jeu et la rivalité de la Vérité et de ce qui n’a été perçu que par quelques uns, à savoir l’importance, ont émergé deux tendance de la philosophie. Au passage ces quelques uns en question sont Spinoza, Nietzsche, Deleuze (avec Foucault et Guattari). Ces deux tendances de la philosophie, nous en avons déjà parlé sont d’un côté la philosophie dogmatique ou académique et d’autre part la philosophie tragique, tragique dans le sens nouveau que lui a donné Nietzsche, c’est-à-dire qui va jusqu’au bout d’un processus, d’une démarche avant de se reposer, tel un guerrier, parce que précisément au bout de cela se trouve l’éternité, celle vécue, l’éternité dans sa nouvelle définition, non celle après la mort. Quant à la philosophie dogmatique ou académique, dogmatique veut dire qu’elle obéit à un principe dont elle ne déviera pas et qu’elle se place dans le cadre de la seule connaissance (l’Epistémè grecque, cette bulle de savoir que les Grecs ont nommé l’être, c’est-à-dire tout ce qui est désignable comme déterminé ou conditionné quand ça apparaît (cf. principe de certitude ou de raison suffisante). Académique, veut dire que ces philosophe qui voyait la vie comme une corruption, comme décadente, par rapport à ce qu’elle avait été, se sont regroupé en école pour résigner, décadents et maladifs. Ah ! tout philosophe au départ est malade et use d’une thérapeutique, souvent enseigné par un maître, mais celui qui ne rompt pas avec son école demeure au fond une « âme timorée », un maladif, un décadent : il triche plus avec lui-même, avec sa vraie nature qu’il ne trahit dans un geste de liberté son école, et comme toute grande époque est fonction de la liberté qu’elle s’autorise, que s’autorise ceux qui y vivent, alors la boucle est bouclée. L’école a eu une autre conséquence celle de produire un discours et à terme de le p
  
Les Grecs ont posé le Bien (Platon), le Vrai, l’homme (Sophocle dans son célèbre passage d’Antigone : l’homme est ce qui est terrible), la vertu comme clé du bonheur (Protagoras). Mais surtout l’immortalité de l’âme et ce qui va avec cette éternité après la mort, celle des idées. Ce sont bien nos idées et nos intuitions qui nous animent mais il n’y a ni L’esprit ni LA matière, tout juste peut voir chez Nietzsche des esprit libres et des esprit de synthèse, car avec l’esprit ce n’est au fond que du corps dont il a été question et même chez Spinoza le prétendu parallélisme entre le corps et l’esprit se trouve rompu dans la durée, au cours du livre V de l’Ethique, puisque c’est la durée, le tempo de l’esprit (du corps intense en fait) qui l’emporte sur la durée, le rythme du corps maladif d’avoir trop persévérer dans son être, dans ses habitudes, l’esprit n’est au fond qu’un corps capable de s’élever à des intensités inouïes (c’est la dimension éternelle chez Spinoza), mais là Nietzsche, à certaines période de sa vie parlerait de crime contre l’esprit, mais c’est un peut comme si la pensée judéo-chrétienne manipulait à travers ce mot, « esprit », l’esprit même de Nietzsche et faisant naître encore dans nos corps l’illusion, la croyance en l’immortalité de l’âme, comme si dans nos yeux encore nos ancêtres regardaient les « dépouilles » des morts en se disant que l’esprit était ailleurs, que l’âme s’était envolée, comme si le rien et le néant qui l’on a surajouter à la vie avait plus de valeur qu’elle. Certes l’énergie (l’animée, l’âme si tu veux) se conserve voire se décuple, mais coupé d’un corps ce n’est plus la même. Pensez à cette anecdote, au grain de sable dans le rein de Cromwell, qui le rendit si disposé à l’invasion de l’Irlande, tant il fallait lui changer l’esprit. C’est dans tout le philosophie de l’éducation du corps dont il a été question, mais de l’éducation du corps à travers l’esprit dit « supérieur », apte à l’abstraction, et non de l’éducation à travers les instincts et les intérêts.

L’Esprit de surplomb fut le privilège de la .philosophie sur les autres domaines, mais les sciences par exemple en se pluralisant se sont émancipées. L'esprit de surplombi permit de produire un discours qui professe, un discours dominant plutôt que de s’intéresser au discours intime de chacun, un discours de minorité, un discours singulier, n’était qu’une étape dans le discours judéo-chrétien : celui qui a posé un Etre tout puissant à savoir Dieu. Le discours judéo-chrétien s’est quelque effrité dans sa rencontre avec les horreur de l’extermination juive de la seconde guerre mondiale, car c’est bien l’homme qui a voulu cela, ces sont des hommes sont par lâcheté non avouée qui ont commis cela, qui par refus non déclaré ont permis cela. On peut toujours chercher à demeurer dans les dimensions personnelle et historique (celle que combattirent Nietzsche puis Deleuze au travers de la dépersonnalistation) et ainsi précisément à toute pensée d’advenir dans sa nouveauté, dans ce que l’on a longtemps appelé subversion, tant on était habitué à la conservation. On peut toujours essayer de relire ce qui s'est passé à Auschwitz, le réinterpréter à partir d'Arendt ou de Heidegger ou à l'opposé de Faye (toussottements) mais nullement nous ne saurions ce qui se dessine à l'avenir. Savoir indiquer ce qui a de l'importance pour une situation donnée et qui plus est pour toute une époque voilà l'une des tâches de la philosophie. Celle-ci ne se reduit pas à un travail d'interprétation et d'explication de textes difficiles qui constitue son corpus, auquel cas on reste engoncés dans l'Epistémè du passé et l'on réclame d'autant une posture de surplomb pour comprendre le fond, le revers de ce monde-ci, mais il est possible de . Appeler ce crible d'approche
« ontologie » c'est un peu réducteur  puisque précisémùent ce n'est pas un discours sur l'Etre ou ce qui est conditionné )à être qu'il faut faire mais une  trajectoire jetée sur l'avenir à partir de toutes les minotrités, les déviances et les aberrations d'aujourd'hui, comme une résidu décadent de la pensée de Platon et d'Aristote s'imposa aux « esprits » au travers du platonisme chrétien. Si l'on part du corps c'est tout autrement que l'on agit, on est plus sensible à l'mmuable comme le furent les Grecs mais à tout les miniscules changement.

L’Esprit de synthèse et de surplomb n’est certainement pas mort, mais il existe plusieurs manières de surplomber, à chacune sa capacité d’action mais aussi quand elle s’impose son époque (l’esprit grec, l’esprit de la Renaissance, l’esprit allemand, dirait-on pour faire synthétique), seulement on en revient à jeter un crible sur ce qui nous entoure (environnement tout anthropomorphique), sur ce que nous voyons (monde centré autour de nous). Que comprends-tu là ? De quoi es-tu capables ?
 
 
 
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1°) La citation de Nietzsche est tirée de NzVP°I,426, XV,492 (Volonté de puissance)
 
 
 
2°) Dans le film Les invasions barbares, de Denys Arcand (Québec, 2003) diffusé ce mois-ci, l’un des personnages disait : « J’ai lu dans les derniers carnets de Wittgenstein : la seule certitude que nous ayons au final c’est la capacité d’agir de notre corps. » (citation de mémoire)
 
 
 
http://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Invasions_barbares
 
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