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ECONOMIE / Théorie de la régulation

12 Avril 2023, 00:47am

Publié par Les étiduants de Paris 8

La théorie économique de la régulation est un courant d'analyse économique originaire de France, qui est apparu dans les années 1970. Il s'inspire des analyses marxistes, keynésiennes et institutionnalistes. Les principaux instigateurs de ce courant, Michel Aglietta et Robert Boyer, cherchent à comprendre et à expliquer les transformations économiques et institutionnelles du capitalisme en étudiant son évolution historique sur une longue période.

Selon la théorie de la régulation, l'économie capitaliste passe par une succession de modes de régulation, qui désignent des formes institutionnelles telles que le rapport salarial, la nature de la monnaie, le degré et les formes de la concurrence, les formes de l'Etat et le régime du commerce international. Ces formes institutionnelles permettent ou non le processus d'accumulation du capital, qui est déterminant dans le mode de production capitaliste, tout en normalisant un ordre social qui assure son développement et sa stabilité.

Les grandes crises économiques marquent une rupture et remettent en cause le mode de régulation précédent. Par exemple, le mode de régulation concurrentiel du XIXe siècle, caractérisé par une accumulation extensive du capital, une concurrence entre entreprises et entre travailleurs grâce à la flexibilité des prix et du marché du travail et un Etat peu interventionniste, a subi la Grande Dépression de la fin du XIXe siècle. En revanche, le mode de régulation fordiste, avec ses politiques économiques néo-libérales ou keynésiennes, a été bousculé par la crise des années 1970.

Aujourd'hui, le capitalisme financiarisé, patrimonial et basé sur la connaissance montre de nombreux déséquilibres systémiques, qui semblent annoncer une refonte de sa régulation. 

Selon la théorie de la régulation, les périodes de crise dans le capitalisme sont souvent associées à des remises en cause des modes de régulation existants, et peuvent conduire à des changements radicaux dans les institutions et les structures économiques. Ces crises peuvent être déclenchées par des tensions sociales et politiques résultant de l'injustice économique et de l'inégalité, qui peuvent à leur tour conduire à des mouvements sociaux et des révolutions.

Ainsi, la théorie de la régulation suggère que les crises économiques peuvent déclencher des changements politiques et sociaux majeurs, et que la régulation économique est donc intimement liée à la stabilité et à la continuité politiques. Cela est particulièrement vrai pour les économies capitalistes, qui dépendent d'un ensemble complexe de réglementations et de lois pour garantir la continuité de l'accumulation du capital et la stabilité politique et sociale.

Dans ce contexte, la régulation économique peut être vue comme un moyen de prévenir les tensions sociales et les conflits qui peuvent conduire à des mouvements révolutionnaires ou à des insurrections. En garantissant une répartition équitable des richesses et en prévenant la concentration excessive de pouvoir économique, la régulation peut contribuer à assurer une stabilité politique et sociale durable et à éviter les défaillances dans le mode de régulation en place.

Les crises économiques peuvent entraîner des changements radicaux dans les régimes politiques et les systèmes économiques. Par exemple, la crise économique de 1929 a conduit à la Grande Dépression, qui a mis en évidence les limites du mode de régulation concurrentiel du XIXe siècle et a conduit à la montée des mouvements politiques radicaux, notamment le fascisme et le nazisme. De même, la crise économique des années 1970, qui a vu la fin du mode de régulation fordiste, a contribué à la montée du néolibéralisme et à l'affaiblissement de l'État-providence.

La théorie économique de la régulation continue d'être un domaine de recherche actif dans les milieux universitaires. Il y a plusieurs chercheurs français actuels en théorie économique de la régulation, ont publié de nombreux travaux et articles sur  les évolutions et les applications de la théorie de la régulation dans différents domaines de l'économie. On peut penser à :

-  Agnès Labrousse, professeure à l'Université Paris Nanterre et à l'Université Paris 8, spécialisée en économie industrielle et économie de la régulation, plus particulièrement de la régulation financière.
-  Robert Boyer, directeur de recherche au CNRS et professeur associé à l'Institut d'études politiques de Paris, l'un des fondateurs de la théorie de la régulation.
-  Michel Aglietta, professeur émérite à l'Université Paris Nanterre, également l'un des fondateurs de la théorie de la régulation.
-  Marc-Hubert Depret, professeur à l'Université Paris 13, spécialisé en économie de la régulation et économie de l'innovation.
-  Olivier Weinstein, professeur à l'Université Paris-Est Créteil, spécialisé en économie de la régulation financière et économie monétaire.
-   Stéphane Vernac, professeur à l'Université Paris Nanterre, travaillant sur la régulation bancaire et financière
-   Sabine Montagne, maîtresse de conférences à l'Université Paris 13, spécialiste de la régulation environnementale et énergétique
-   Dominique Méda, professeure à l'Université Paris Dauphine, travaillant sur les transformations du travail et la régulation sociale
-   Robert Salais, professeur à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, spécialiste de la régulation du marché du travail et des politiques d'emploi.

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