La Philosophie à Paris

L'INCONSCIENT ET LE SEXUEL / Lacan

21 Mars 2006, 12:55pm

Publié par Les Etudiants de Paris 8

Jacques-Marie Émile Lacan

psychiatre et psychanalyste, 1901-1981

 

 

Jacques Lacan est originaire d'une famille bourgeoise de province. Il a fait des études en médecine puis s'est tourné vers la pratique psychiatrique. Marginal, séducteur, provoquant, Lacan assimilera tout autant l'enseignement de Gaëtan Gatien de Clérambault que celui du philosophe Alexandre Kojève, préparant ainsi ses élaborations théoriques originales qui porteront toujours le sceau d'une réflexion philosophique.

Analysé sur le divan de Rudolf Loewenstein, comme Nacht et Lagache à qui il aura à se confronter plus tard, Lacan effectue sa grande entrée sur la scène de la psychanalyse internationale lors du congrès de Marienbad par la présentation de son texte sur le stade du miroir. Lacan inaugurait ainsi une façon de théoriser la psychanalyse qui allait désormais porter sa marque. Écrite dans un style alambiqué, la pensée de Lacan tirera toujours sa matière de la fécondation d'autres disciplines. L'inspiration trouvée alors chez Henri Wallon fera place à diverses autres sources au premiers rangs desquelles il faudrait placer la linguistique de Ferdinand de Saussure et de Roman Jacobson. Il semble que Félix Guattari fut son analysant jusqu'en 1960.

Jacques Lacan a fondé en 1964, après une série de ruptures, l'École Freudienne de Paris qui se place en marge de l'International Psycho-Analytic Association et qui dominera de son éclat et par ses déchirements la scène analytique française. Lacan sera le grand inspirateur de cette vaste expérience analytique et intellectuelle que sera l'École jusqu'à sa dissolution en 1980. Souvent attaqué en raison de son aspect théâtral et tapageur, l'enseignement de Lacan, difficile à aborder, commence, suite au décès du maître en 1981, à se répandre et à trouver sa place dans la réflexion analytique en se dégageant des phénomènes de transfert et d'idéalisation qui lui ont souvent nui.


En 1990, lors d'un colloque sur Lacan, Jacques Derrida raconta les circonstances de sa première rencontre avec celui-ci, lors d'un symposium sur le structuralisme organisé en octobre 1966 par l'université Johns Hopkins de Baltimore. A cette date, Lacan craignait que l'idée de réunir en 900 pages la quintessence de son enseignement n'aboutît à un désastre : "Vous verrez, avait-il dit à Derrida, parlant de la reliure, ça ne va pas tenir."

Telle était l'angoisse qui tenaillait cet homme, dès que se posait pour lui la question de la publication. "Poubellication", dira-t-il plus tard en désignant par ce terme le reste, le résidu ou le déchet que pouvait être à ses yeux l'objet de son plus cher désir. "Stécriture", dira-t-il à propos de son Séminaire, manifestant par un geste dédaigneux à quel point il faisait semblant de mépriser le passage de la parole à l'écrit.

On sait qu'hormis sa thèse de médecine de 1932 (De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité, Seuil, 1975), Lacan n'a jamais ni écrit ni publié un "vrai" livre. Le Séminaire, aujourd'hui en cours de publication (14 volumes édités sur 25), n'est autre que la transcription d'un enseignement oral délivré en divers lieux, de 1953 à 1979 : hôpital Sainte-Anne, Ecole normale supérieure (ENS), faculté de droit du Panthéon. Quant aux fameux Ecrits, il s'agit d'un recueil de 34 articles ou interventions rédigés entre 1936 et 1966 pour des colloques ou des revues et qui, pour la moitié d'entre eux (après 1953), sont une sorte de synthèse de son enseignement oral.

Etant avant tout un brillant orateur alliant un style baroque à une pensée toujours en mouvement - sans commencement ni fin -, Lacan n'aurait jamais été capable de prendre l'initiative de la publication d'un tel opus magnum sans l'aide d'un grand éditeur ayant une solide formation philosophique, et qui était aussi son ami et son analysant sans être ni un disciple ni un idolâtre : François Wahl.

Depuis 1964, avec son entrée à l'ENS de la rue d'Ulm - grâce à l'initiative de Louis Althusser - puis avec la création de l'Ecole freudienne de Paris, Lacan était déjà devenu, au-delà de sa pratique clinique, un penseur reconnu et contesté, au même titre que Michel Foucault, Roland Barthes, Jacques Derrida, Gilles Deleuze, etc. Ainsi appartenait-il à une génération intellectuelle plus engagée dans un travail sur les structures inconscientes de la subjectivité que dans une réflexion de type phénoménologique - héritée de Jean-Paul Sartre - sur le statut de la conscience de soi du sujet dans sa relation au monde : une philosophie du concept plutôt que de l'existence.

A cet égard, Lacan fut le seul parmi les interprètes de la doctrine psychanalytique à doter l'oeuvre freudienne d'une conceptualité philosophique. Il l'arracha, au prix d'une infidélité majeure, au modèle biologique qui avait été son point d'appui. Alors que Freud souhaitait, sans jamais y parvenir, que sa discipline devînt une science de la nature, Lacan l'inscrivit dans le registre des sciences humaines en s'inspirant de la linguistique et de l'anthropologie. Il effectua une relève du freudisme fondée non pas sur le dépassement des origines mais sur un retour aux textes fondateurs : une relève orthodoxe et subversive. On trouve dans les Ecrits les différentes étapes de cette élaboration, ponctuée de formules saisissantes : "L'inconscient est structuré comme un langage", "Le désir de l'homme c'est le désir de l'Autre", "Moi, la vérité, je parle", "Il n'y a pas d'Autre de l'Autre", etc.


Un site à ne pas râter :

Gaogoa - L'ensemble de ses séminaires s'y trouve répertorié et une grande majorité est mise en ligne

 

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T
<br /> je suis désolé d'être plat à vous répondre (je n'arrive pas à comprendre ce que vous revendiquez): où est le rapport avec ce que j'écrivai? et, dites-le, que voulez-vous (et) dire? (thfd bern.).<br /> <br /> <br />
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T
<br /> Dans l'urgence ou trouve parfois (l')issue.<br /> La parole de lacan est celle de la découverte:<br /> celle de Psyrespirans (site réflectant la folie) est un récent essai, quasi surréaliste dans sa globalité, né de l'urgence, gravissime, ...dans un contexte socio-politique bien différent, de celui<br /> qui connu Lacan... Le site cherche à ré-esquisser une issue, à la complexité de cette paradoxale folie ... Et si en parcimonie d'héritage, il contribuait à laisser se dire cette qualité de l'oeuvre<br /> initée par l'incontournable analyste??<br /> <br /> <br />
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A
<br /> Penser dans l'urgence ne sert à rien, mais trouver une issue à une situation difficile est préférable... Lacan ne fait que bricoler et abandonner ses bricolage : il nous fait prendre des vessie<br /> pour des lanternes. Le problèmes ce sont les esprits qui s'en réclament, qui font des vessies des "vérités mi-dites", histoire d'instiller la vengeance.<br /> <br /> <br />