La Philosophie à Paris

NOTES DE LECTURE / Nietzche par Dorian Astor

7 Mai 2011, 20:51pm

Publié par Anthony Le Cazals

Prise de notes selon les thématiques porteuses de la biographie de Dorian Astor sur Nietzsche.

 

Volonté de puissance partant du plaisir
Dans Humain trop humain "sa seule loi est "le plaisir", terme encore inadéquate que Nietzsche emploie parce qu'il contient un élément qui était absent de l'utilité et de l'avantage chez Darwin : la jouissance de soi dans l'existence. Cet instinct par lequel la nature gouverne le monde n'a pas encore trouvé sa formulation définitive, qui sera volonté de puissance." AstNB_208.

La démarche généalogique de Nietzsche : le sens philologique et le confilt entre nature et contre-nature
Cette démarche est à la fois régressive (faire la préhistoire des valeurs) et analogique déduire de la psychologie de l'individu l'essence de la civilisation) doit avoir pour modèles méthodologiques l'histoire de la philologie et la science positive, non tant dans ses résultats qu'en vertu de leur rigueur, qui interdit les sauts permanents entre sphères hétérogènes les unes aux autres, les dangers de l'abstraction et de l'universalisation. AstNB


Pour entreprendre une inversion des valeurs, il fallait peut-être plus de pouvoirs contradictoires qu'il n'en a jamais coexisté chez un même individu, et surtout des pouvoirs contradictoires qui ne doivent ni se gêner ni se détruire. La hiérarchie des pouvoir, le recul, l'art de séparer sans brouiller, de ne rein embrouiller, de ne rien "concilier", une versatilité prodigieuse qui soit pourtant l'opposé du chaos - tel fut la condition première, le long travail magistral et secret de mon instinct. NzOPC°VIII_272


Ceci est lié au conflit entre nature et contre-nature (idéalisme ou tout artéfact  collectif qui n'est pas une singularité, c'est un peu le contre-pied de Montaigne qui citant Lucrèce dit que rien advient qui soit unique)
Que m'importe que mes amis affirme que mon actuelle  "liberté d'esprit" soit une décision excentrique, tenue avec les dents _264

Gardons-nous de déclarer qu'il y a des lois dans la nature. Il y a que des nécessités : là nul ne commande, nul n'obéit, nul ne transgresse. Dès lors que vous savez qu'il n'y a point de but, vous savez qu'il n'y a point de hasard. Car ce n'est qu'au regard d'un monde de buts que le mot hasard à un sens. Gardons-nous de dire que la mort serait opposée à la vie. Le vivant n'est qu'un genre de ce qui est mort, et un genre fort rare. - Gardons-nous de penser que le monde crée éternellement du nouveau. Il n'est point de substance éternellement durable ; la matière est autant une erreur que le Dieu des Eléates. Quand donc en aurons-nous fini avec nos précautions et nos soins ? Quand toutes ces ombres de Dieu cesseront-elles de nous obscurcir ? Quand aurons-nous totalement dédivinisé la nature ? Quand nous sera-t-il permis de nous naturaliser, nous autres hommes, avec la nature pure, nouvellement découverte, nouvellement libérée ? " NzHH°II,109.
Il n'y a pas de nature pure chez Nietzsche sinon la nature première de sa personnalité. Là tout y passe les conception du hasard (qui n'a rien à voir avec les coups de chance, les réussite), Dieu nommé Etre chez les Eléates, la matière qui n'est qu'une vision de l'esprit, la substance via le principe de permanence et donc le sujet et la causalité qui en découlent. Nietzsche en appelle à une naturalisation de notre instinct de connaissance, ce qui contre le nihilisme inclus dans l'idéalisme platonique d'un Proust ou d'un Beckett

 

Perspective et Oubli de soi
"Qui devinera ne serait-ce qu'un instant [...] quleque chose des glaces et des angoisses de l'isolement auxquelles toutes difféences de vues condamne quiconque en est affecté, celui-là comprendra que j'ai si souvent cherché n'importe où pour me délasser de moi-même, m'oublier moi-même en quelque sorte un instant... dans une vénération, une inimitié, un jeu scientifique, une frivolité, une bêtise, n'importe..."  NzHH préface de 1886.

Dorian Astor développe assez peu sur l'amour de soi, le grand mépris de l'homme pour l'homme que Nietzche reprend à la tradition juive ainsi que la thématique du Grand mépris. Par contre il revient à plusieurs reprises sur le délassement. Interpréter Nietzsche c'est avant tout s'exposer soi-même.


L'idéal d'une communauté d' "esprits libres" AstNB_186
"C'est ainsi que j'ai inventé un jour que j'en avait besoin, les "esprits libres" [...] de ces "esprits libres" il n'y en a pas, il n'y en a jamais eu" NzHH préface de 1886.
Astor ne perçoit pas l'idéal de Nietzsche, aussi se permet-il : l'homme d'action a toujours un idéal à quoi il s'aliène et consacre toute son énergie. L'idéal est un fardeau que ni le génie ni l'homme d'action ne savent déposer.

L'école du soupçon contre l'esprit de science qui rapetisse l'homme
La Rochefoucauld et les autres maîtres français de l'étude psychologique (auxquels s'est joint aussi ces temps derniers un Allemand, l'auteur des Observation psychologiques) ressemblent à des tireurs qui visent juste et mettent régulièrement dans le noir,  - mais le noir de la nature humaine. Leur adresse suscite l'étonnement, mais un spectateur qui est guidé par l'amour des hommes et non par l'esprit de science finira par maudire cet art qui semble inculquer aux âmes la tendance à rapetisser et à suspecter l'homme NzHH°I,475
La dégénescence d'ensemble de l'homme, sombra jusqu'à "l'homme de l'avenir " tel qu'il apparaît aujourd'hui aux balourds socialistes aux esprits plats - leur idéal -, cette dégénescence et ce rapettissement de l'homme  en parfait animal de troupeau (ou comme ils le disent en homme de la "société libre"), cette bestialisation de l'homme transformé en animal nain aux droits égaux et aux prétentions égales est possible, cela ne fait aucun doute NzBM°203

Ma formule pour tout ce qu'il y a de grand dans l'homme amor fati Nz cité Ast_347 56

 

 Contre l'idéalisme
Tout une catégorie du plus pernicieux "idéalisme" [...] a pour but de contaminer ce qu'il y a de bonne conscience et de naturel dans l'amour sexuel... Et pour ne laisser aucun doute sur mes conviction aussi strictes qu'honnêtes sur ce chapitre, je vais communiquer un principe de mon code moral contre el vice : sous le nom de vice je combats toute espèce de contre-nature, ou si l'on préfère les grands mots, d'idéalisme. Ce principe s'énonce ainsi : "Prêcher la chasteté [ce que fera Nietzsche dans un moment de désœuvrement"] est une incitation publique à la contre-nature. Mépricer la vie sexuelle, la souiller par la notion d' "impureté" est un crime contre la vie même, - c'est le vrai pêché contre l'esprit sain de la vie."

Car vous êtes une idéaliste - et je traite quant à moi, l'idéalisme comme une insincérité devenue instinct, comme la volonté à tout pris de ne pas voir la réalité : chaque phrase de mes écrits contient le mépris de l'idéalisme. Lettre  à Malwida von Meyersburg, 29 oct 1888
Qui a donc à s'évader de la réalité par le mensonge ? Celui qui souffre de la réalité. Mais souffrir de la réalité, cela veut dire être une réalité manquée. NzSB8

 

Contre le Christianisme

Si le christianisme  a tout fait  pour orientaliser l'Occident, c'est le judaïsme  qui a essentiellement contribuer à l'occidentaliser derechef et sans trêve  ce qui équivaut en un certain sens à faire de la mission et de l'histoire de la l'Europe la continuation de celle de la Grêce. NzHH°I,36


Les lieux.

Dorian Astor revient souvent sur les villes que fréquente Nietzsche comme Méssine ou Venise pour lesquelles il a des sentiments ambivalent. Venise étant sa ville préférée alors que Dorian Astor certaineent après avoiir relu la partie physiologique et climatologique d'Ecce Homo descendra Venise en flèche. Quoiqu'il en soit par rapport à une autre ville comme Messine, il fait de suite le rapprochement avec la Provence, au climat sec contrairement au "Sirroco Venitien humide.

Les Idylle de Messine Chanson du Prince Hors-a-loi Vogelfrei, libre comme un oiseau.
Le Chant du Prince Hors-la-loi, composé en grande partie en Sicile, rappelle explicitement la notion provençale de gaya scienza, cette unité de troubadour, de chevallier et d'esprit fort, qui distingue si nettement de toutes les cultures équivoques cette admiralbe culture provençale de haute époque. D'autant que le tout derniepoème, Au mistral, un chant de danse plein de verve, dans lequel, ne vous en déplaise, c'est la morale qu'on piétine en dansant - est d'un "provençalisme" parfait.
Le terme de Gai savoir vient de Stendhal dont Nietzsche était un lecteur assidu en français (comme pour Schopenhauer, dostoïevski). " les cours d'amour datent de 1150, et la vie fut fort gaie en Provence jusqu'au sombre Louis XI, qui la réunit. Bientôt ce pays cessa d'être supérieur à ces voisins par l'esprit et le gai savoir". Stendhal, Mémoires d'un touristes. Et Astor d'ajouter "Nietzsche, comme Stendhal, suggère que la science est devenue triste depuis la formation de l'état moderne, et depuis l'établissement d'une hégémonie du Nord sur le Sud". Cette hégémonie du Nord sur le Sud se retrouve dans nombre de pays (Italie, Belgique, même si celle-ci n'a pas toujours eu lieu à l'exemple de Bruxelles la francophone. En Espagne c'est l'inverse qui se passe, ce sont les Nords Basques et Catalan qui portent en eux une chose bien irrationnelle qu'on nomme le modernisme catalan.

 Zarathoustra

Zarathoustra apparaît une première fois sous le personnage de l'insensé qui cherche Dieu parmi les hommes rassemblés : "L'insensé se précipita au milieu d'eux et les perça de ses regards. "Où est Dieu ? cria-il, je vais vous le dire ! Nous l'avons tué - vous et moi ! Nous sommes tous des meurtriers ! [...] la grandeur de cette action n'est-elle pas trop grande pour nous [..] J'arrive trop tôt, dit-il ensuite, mon temps n'est pas encore venu. Ce formidable événement est encore en marche et voyage - il n'est pas encore parvenu aux oreilles des hommes" NzGS, OPC V_149-150
Zarathoustra, le premier, a vu dans la lutte du bien et du mal la vraie roue motrice du cours des choses [...]. Zarathoustra a suscité cette funeste erreur qu'est la morale : par conséquent il doit être le premier à la reconnaître.
Mais c'est en fait là la grande thématique du couper l'histoire en deux
"Nous sommes tous des meurtriers et quiconque naîtra après nous appartiendra, en vertu de cette action même [celle du crime de lèse-divinité], à une histoire supérieure à tout ce que fut jamais l'histoire jusqu'alors !" NzGS, OPC V_149-150

 

AstNB, Nietzsche Biographie par Dorian Astor

NzBM, par delà bien et mal, éd. Flammarion

Nz GS Gai savoir

NzHH Humain trop humain

NzSB Nietzsche Sämtliche Briefe

NZOPC V
NzOPC°VIII

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