La Philosophie à Paris

LA PERTE DU GENRE 7 / Un rapport homme-femme différent.

7 Novembre 2008, 21:23pm

Publié par Anthony Le Cazals

Un rapport homme-femme différent. — Si un changement dans la procréation de l’enfant survenait, cela induirait de fait une différence moins marquée entre l’homme et la femme, dans la répartition des tâches. Nous avons vu déjà, avec le genre vernaculaire, que ce ne sont plus deux genres répartis au sein du foyer en vue de fonder une famille mais deux sexes. Même si cela ne conduit pas à des rapports d’égalité entre les sexes, la grossesse contrôlé voire séparée de l’utérus, est-elle un pas supplémentaire mais inconscient vers ce que Nietzsche nomme le surhomme, c’est-à-dire l’homme sans Dieu le Père — avec la réapparition d’un demi-dieu effacé jusque là Dionysos ? Toute réponse ne serait que spéculation. Le sexe sera libéré du genre — procréation de la lignée comme l’affirme déjà Ivan Illich IllGV_65-69/78-83 ou Henri Atlan AtlUA_135 La question de l’homme — plutôt que de la femme ou de l’espèce — était celle de Dieu le Père, déjà chez les Grecs (Atlan, UA_135) et c’est cela qui meurt avec la procréation artificielle. Les questions des sociétés matriarcales étaient centrées autour de la fécondité, de la Mère-Nature mais certainement pas autour de l’homme. Le surhomme n’est pas une histoire d’humain amélioré par la morale mais il pose davantage la question du rapport homme femme sans le Dieu de la (pro)création pour les chapeauter. Machina ex Deus. « La suppression de la grossesse et de l’accouchement, bouleversant la réalité physique de la maternité, risque d’entraîner sinon la disparition de tout sentiment maternel, du moins des modifications profondes dans la façon qu’aura une femme de concevoir et de vivre une maternité éventuelle. En fait, la maternité, dans les conditions d’une ectogenèse [grossesse artificielle] deviendrait très proche de la paternité » AtlUA_150-151. Suivant toutes ces hypothèses, si l’utérus artificiel se substitue au ventre de la mère, une dimension du genre vernaculaire disparaîtrait. La féminité ne serait plus intrinsèquement liée à la maternité. Même si la parenté et la filiation se réadaptaient, la féminité se détachera bel et bien de la maternité — qui tourne tout entière autour de la grossesse. La virilité se détachera à son tour de la patrie. « La différence des sexes dans la procréation et la filiation aura disparu en tant que donnée de la nature immédiate » AtlUUA_132. Il en serait fini de la prééminence des genres. Place aux sexes ? Quoiqu’il en soit, poser la question de la procréation artificielle c’est faire qu’elle tombe dans la société civile et on qu’elle soit le jouet d’un état autoritaire — mondialisé ou partitionné entre nations —  comme pouvait l’être avec le contrôle des naissances la société spartiate ou les lebenborn nazis — les orphelinats sélectionnant la « race aryenne ». C’est par l’émergence d’une sexualité consumable et monayable qu’Ivan Illich pense que le genre est ce qui protège la femme. A son sens « seule une réelle philosophie du genre pourrait fournir une explication satisfaisante [à cela] — cette philosophie n’existe pas encore. » IllGV_82.  Mais Illich en était resté à une intrusion de l’esprit dans le foyer, intrusion qui a lieu dans les sociétés de la faute et de l’aveu. Une philosophie de la procréation serait non la perpétuation d’une lignée basée sur le genre mais l’affirmation de valeurs nouvelles et un effort mené sur soi qui n’autorise que la fuite ou la lutte. Cette société serait à la fois plus cruelle et plus affective. Elle serait plus cruelle car basée non plus sur la représentation mais sur l’affectivité.

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