La Philosophie à Paris

AUTONOMIE ET HIERARCHIE 1 / La hiérarchie chez les rats

1 Juin 2006, 17:33pm

Publié par Paris 8 philo

 

Nous aimerions vous faire part d'une expérience intéressante : C'est l'experience dite de la Hiérarchie des rats.Des scientifiques français (à Nancy) ont placé un groupe de rats dans un dispositif constitué de deux "pièces" qui communiquent entre elle par un couloir en partie rempli d'eau, une des pièces est vaste et permet aux rats d'avoir suffisamment de place et l'autre est conçu de telle manière que les rats ne peuvent y séjourner, hors c'est dans celle-ci que de la nourriture est déposée quotidiennement. Résultat, les rats doivent passer par le couloir peu praticable pour aller chercher de la nourriture dans une pièce dans laquelle ils ne peuvent séjourner et doivent donc retourner avec la nourriture dans la première pièce pour la consommer. Très rapidement la population de rats se partage en trois groupes, ceux du premier vont chercher de la nourriture qu'il se font piquer à leur retour par ceux du deuxième et il y en a un troisieme qui va chercher la nourriture, la ramène et la consomme. Si on remplace tous les rats par une nouvelle population, on retrouve très vite le même partage en trois groupes, mais surtout dans les mêmes proportions! Et il semble que l'on puisse changer les rats indéfiniment, le partage se fera toujours dans les mêmes proportions! Les scientifiques ont mêmes ont alors eu l'idée plutôt que de remplacer tous les rats, de les rassembler par groupe (les "exploiteurs", les "exploités" et les "autonomes"), et là encore le partage avait lieu...toujours dans les mêmes proportions! Dans le cas des "autonomes" par exemple, une partie devenait "exploité" et l'autre "exploiteur".

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Ceci est pour faire écho à un article sur Nieztsche : la hiérarchie nietzschéenne écrit avant de connaitre cette expérience. Paris8philo

 

Bernard Werber en parle en ces termes :

 

Bernard Werber

© Albin Michel

Hiérarchie chez les rats

 

Une expérience a été effectuée sur des rats. Pour étudier leur aptitude à nager, un chercheur du laboratoire de biologie comportementale de la faculté de Nancy, Didier Desor, en a réuni six dans une cage dont l'unique issue débouchait sur une piscine qu'il leur fallait traverser pour atteindre une mangeoire distribuant les aliments. On a rapidement constaté que les six rats n'allaient pas chercher leur nourriture en nageant de concert. Des rôles sont apparus qu'ils s'étaient ainsi répartis: deux nageurs exploités, deux non nageurs exploiteurs, un nageur autonome et un non nageur souffre-douleur.

Les deux exploités allaient chercher la nourriture en nageant sous l'eau. Lorsqu'ils revenaient à la cage, les deux exploiteurs les frappaient et leur enfonçaient la tête sous l'eau jusqu'à ce qu'ils lâchent leur magot. Ce n'est qu'après avoir nourri les deux exploiteurs que les deux exploités soumis pouvaient se permettre de consommer leur propre croquette. Les exploiteurs ne nageaient jamais, ils se contentaient de rosser les nageurs pour être nourris.

L'autonome était un nageur assez robuste pour ramener sa nourriture et passer les exploiteurs pour se nourrir de son propre labeur. Le souffre-douleur, enfin, était incapable de nager et incapable d'effrayer les exploités, alors il ramassait les miettes tombées lors des combats. La même structure-deux exploités, deux exploiteurs, un autonome et un souffre-douleur se retrouva dans les vingt cages où l'expérience fut reconduite.

Pour mieux comprendre ce mécanisme de hiérarchie, Didier Desor plaça six exploiteurs ensemble. Ils se battirent toute la nuit. Au matin, ils avaient recréée les mêmes rôles. Deux exploiteurs, deux exploités, un souffre douleur, un autonome. Et on a obtenu encore le même résultats en réunissant six exploités dans une même cage, six autonomes, ou six souffre douleur.

Puis l'expérience a été reproduite avec une cage plus grande contenant deux cents individus. Ils se sont battus toute la nuit, le lendemain il y avait trois rats crucifiés dont les autres avaient arraché la peau. Moralité: plus la société est nombreuse plus la cruauté envers les souffre douleur augmente. Parallèlement, les exploiteurs de la cage des deux cents entretenaient une hiérarchie de lieutenants afin de répercuter leur autorité sans même qu'ils aient besoin de se donner le mal de terroriser les exploités.

Autre prolongation de cette recherche, les savants de Nancy ont ouvert par la suite les crânes et analysés les cerveaux. Or les plus stressés n'étaient ni les souffre-douleur, ni les exploités, mais les exploiteurs. Ils devaient affreusement craindre de perdre leur statut privilégié et d'être obligés d'aller un jour au travail.

Se pourrait-il que pour chaque espèce animale il existe une sorte de grille d'organisation spécifique. Quels que soient les individus choisis, dès qu'ils sont plus de deux, ils s'empressent de tenter de reproduire cette grille pour s'y intégrer. Peut-être que l'espèce humaine est tributaire elle aussi d'une telle grille. Et quel que soit le gouvernement anarchiste, despotique, monarchiste, républicain ou démocratique, nous retombions dans une répartition similaire des hiérarchies. Seules changent l'appellation et le mode de désignation des exploiteurs.

site de Bernard Werber, l'auteur des Fourmis : http://www.bernardwerber.com/

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C
<br /> Le problème de cette expérience, c'est qu'elle s'est faite dans des conditions bien particulières d'un laboratoire, avec des contraintes inhérentes et faussant le jeu... Dans la nature les rats<br /> agiraient autrements, car il auront d'autres possibilités. C'est la même chose que de dire que la femelle de la mante religieuse mange le mâle durant la copulation. Si ça se passe comme ça, c'est<br /> parce qu'au moment ou elle le fait, elle n'a pas d'autres sources de protéine à portée de main. Il en va de sa survie. Dans la nature, le mâle a le temps de partir...<br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> Donc puisque vous me parlez Nature, je vous parlerai Culture (pas forcément en laboratoire)... Il n'y a que les tendances propres à toute "société fermée". Ce n'est pas la panacée, mais c'est<br /> très proche je m'en excuse de la configuration d'un pays dirigé par un pour religieux et politique, avec ses personnes tendant à l'automie (les métiers), ses personnes tendant à l'émancipation<br /> mais qui ratent toujours (les esclaves) et son tiers-état amorphe. C'est simplement pour dire que dès 6 individus il y a déjà des tendances qui se forment... Rien de déterministe en cela, puisque<br /> ce n'est qu'une configuration de laboratoire et qu'il existe mille territoire et des aberrations parmi ceux-ci, les fameuses déterritorialisations.<br /> <br /> <br /> <br />
A
Cette citation me paraît intéresante juste pour pointé quelque chose, sans doute le côté bourgeois de notre pensée (lol) : «Je pose en principe un fait peu contestable : que l'homme est l'animal qui n'accepte pas simplement le donné naturel, qui le nie. Il change ainsi le monde extérieur naturel, il en tire des outils et des objets fabriqués qui composent un monde nouveau, le monde humain. L'homme parallèlement se nie lui-même, il s'éduque, il refuse par exemple de donner à la satisfaction de ses besoins animaux ce cours libre, auquel líanimal n'apportait pas de réserve. Il est nécessaire encore d'accorder que les deux négations, que, d'une part, l'homme fait du monde donné et, díautre part, de sa propre animalité, sont liées. Il ne nous appartient pas de donner une priorité à l'une ou à l'autre, de chercher si l'éducation (qui apparaît sous la forme des interdits religieux) est la conséquence du travail, ou le travail la conséquence d'une mutation morale. Mais en tant qu'il y a homme, il y a d'une part travail et de l'autre négation par interdits de l'animalité de l'homme>>. G. BATAILLE, L'Erotisme in Oeuvres complètes, t. X, Paris, Gallimard, p. 212.
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C
Il ne s\\\'agit pas de bons sentiments, mais d\\\'une réalité...lorsque je parle de liberté,égalité,fraternité...il ne s\\\'agit de fait, mais d\\\'un horizon...nous sommes perfectible et doué d\\\'imagination ! (c\\\'est ce qui nous différencie...la vitesse d\\\'adaptation, d\\\'évolution..)nous devons (parce que nous en avons le pouvoir ou les capacités ) justement nous libérer de nos intuitions (animales) et les maitriser avec ce formidable outil qu\\\'est la raison, la pensée.pas de toutes bien sûr...juste celles qui nous confinent dans les shémas...hierarchiques)tu considères le fait, donc ce qui est naturel ,et cela peut-être te suffit-il à organiser le constat ( que l\\\'on fait tous) cependant il y a des perspectives, des horizons qui nous appartiennent en tant qu\\\'humain...et cela n\\\'est pas une hypothèse mais relève d\\\'une approche scientifique - comment est née la pensée, la conscience ? n\\\'est-ce pas la ce qui nous differencie de l\\\'animaln\\\'est-ce pas là le sixième sens ? je te renvoie sur un article dont voici le lien: www.admiroutes.asso.fr/larevue/2000/1/livre.htmen outre être proche des animaux ne me gène aucunementpas plus que de l\\\'australopithèque...Mais il est évident que le discours que tu tiens (?!) est une tendance qui va dans le sens de l\\\'organisation hierarchique de la socièté et qui permet à celle-ci de perdurer.Quant au ton incisif....tu fais ce que tu veux ...mais attention cela peut révèler le trouble d\\\'une morale bourgeoise se sentant agressée.sans rancunecharles
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C
Vous allez un peu vite en besogne et vos raccourcissont expressJustement ce qui nous differencie des animaux n'est-ce pas la capacité de faire appel au raisonnement et donc de pouvoir s'organiser de façon transversale pour le bien de tous...!!la liberté comme base, l'égalité comme moyen et la fraternité pour but... dans tous les sens cela fonctionne.nous savons que nous pouvons nous organiser nous en avons les capacités contrairement aux animaux qui eux resteront toujours tributaire de leur intuition
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Y
Tu oublies combien tu es prisonnier de ton raisonnement :) la liberté comme base, l'égalité comme moyen et la fraternité pour but... Désolé de jouer les rabat-joie mais tout ceci ce sont des grands mots :). La liberté n'est connue que par quelques uns, elle n'est donc pas une base commune, ou alors tu tombes dans le nihilisme. Il n'y a jamais d'égalité de fait elle ne peut^être posée qu'en droit. Quant à la fraternité tu peux tout à fait la poser comme un but mais va dire ça à nos grands patrons et à nos dirigeants, eux n'aspirent qu'à attirer vers tout vers eux, en prédateurs.Quelle mechanceté de ma part de diagnostiquer, en grand sceptique plusz qu'en pessimiste, un foutu nihilisme : dans tous les sens cela fonctionne, veut aussi que si tout fait sens alors rien n'a de valeur :).Nous devons précisément nous appuyer sur nos intuitions pour sortir des raisonnement convenus et par l'habitude (morale si tu veux) et par le langage (qui lui aussi découle de cette morale). Toi même tu parle de "Bien pour tous", donc d'une forme d'intérêt général tranversale, les fourmis font de même et savent s'organiser sans renvoyer à des livres compliqués, pense à ceux de Bernard Werber (que je n'ai pas lu).<br /> Je ne vois pas ce qu'il a de mal à être plus proche des animaux qu'on ne le croit puisque nous sommes en tant que vivants, des animaux. Et qu'on ne me sorte pas des histoires de "conscience supérieure" ou là je m'éfondre directement. Nous sommes bien moins libre dans l'ensemble que nous n'en avons la capacité. Admire combien d'entre nous reprodiusent le schéma familial. <br /> Tous ceci est une question d'effort et de positivité à déclarer. On en est bien loin. Mais tu sembles connaître le monde alors éclaire-nous Charles.<br /> Bon soirée à toi. Et pardon pour le ton incisif, mais les bons sentiments nous éloigne de nos capactités justement.
H
Pour ceux...http://www.diffusion.ens.fr/index.php?res=conf&idconf=1292en lien avec le cours de Plinio Prado sur les techniques de vie.
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H
http://peccatte.karefil.com/SBPresse/LeMondeEducJB.html
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A
Mr de Laboratoire, Souhaiteriez vous faire parti du comité éditorial avec Le Cazals, Pequanthrop', Béa, Cipriano (qui peut-être un jour passera) et Moi Anthony ?<br /> Hey Hey<br />  
H
Vertiges et prodiges de l'analogie, comme dit l'autre. Laborit dans ses labos rit des rats et dit: l'homme n'est-il pas un animal - belle decouverte ! certes, mais politique, et c'est la l'essentiel. Sur la hierarchie, voir Louis Dumont . Mais il traite ses objets avec la methode et l'austerite que Laborit a su soigneusement eviter (paresse ou strategie?). Pour ce dernier, qui a du beaucoup voyager, le succes repose sur un indigeste melange inspire d'hypotheses scientifiques non explicitees, de fictions logiques rigoureusement developpees, et pour la matiere de longs reves eveilles. Un peu comme Werber. Mon avis: des contes modernes, loin, tres loin de la realite de premiere main.
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P
Nous sommes très honorés de pouvoir compter Mr Henri Laborat parmi nos lecteur et commentateurs. Certainement un cousin islandais ou gerçois du Pr Laborit, notoirement célébre.<br />  <br /> eT OUIS IL Y A LE FILM "DAS EXPERIMENT"<br /> http://www.voir.ca/radar/films/film.aspx?id=4390&type=6&idcontribution=37195&sm=2
P
Si faire des parallèles entre hommes et animaux vous intéressent, je vous invite à voir "Mon oncle d'Amérique" (Alain Resnais, 1980), dans lequel le professeur Henri Laborit joue son propre rôle.
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A
Eh oui c'est un grand film, à voir, absolument. ou comment l'homme, dans son inconstance, agit comme un rat. Le mieux ce sont les scènes où les hommes deviennent des rats où l'inverse. A noter que ce film est réalisé en étroite collaboration avec un scientifique qui même son propre rôle. A la fin ça fait réléchir.<br /> Bonne Semaine à tous 
Y
experience assez revelatrice , l'homme n'est qu'un mammifere
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A
Ah diable cet animal humain !
M
Merci pour votre visite sur Marcopolis...je découvre votre blog, fort intéressant....je reviendrai vous lire...
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A
Merci et à bientôt (même si tu mets le même message sur tous les sites)